Prix du Livre de Géographie des lycéens et étudiants de CPGE Le texte de la classe de LS3 option Géographie 2020-2021 sélectionné !

L'an passé le texte rédigé par les Étudiants groupe option Géographie  de LS3 : Bremme Auriane, Chauprade Marguerite, Clerquin Marianne, Cousturian Astrid, De Fraipont Yuni, Ducatel Amandine, Gausseron Aimée, Guillemoz Gabriel, Imard-Steinberg Aliocha, Laurent Tom, Massé Anaïs, Morlan Adèle, Paoletti Camille, Taverne-Villeneuve Iris, Thévenin Céleste, tous élèves de madame Picardat, a été sélectionné. 

Ils avaient choisi de soutenir le livre de Marie-Gibert-Flutre, 

Les envers de la métropolisation, les ruelles de Hô Chi Minh Ville, Vietnam, CNRS éditions. 


Les envers de la métropolisation: les ruelles de Hô Chí Minh Ville, Vietnam

de Marie Gibert-Flutre

La lecture des ouvrages proposés pour ce concours a permis à notre classe d’explorer de nouvelles dimensions de la géographie et ce par une multitude d’approches, de la géographie radicale à la géographie physique, en passant par la géographie sociale, de l’échelle mondiale à l’étude centrée sur des territoires à grande échelle comme dans les Politiques du flamant rose et d’Hô Chi Minh Ville. Après avoir lu tous les ouvrages et longuement discuté et débattu à leur sujet, notre choix, pour ce concours du Prix de Livre de Géographie, s’est porté sur Les envers de la métropolisation : les ruelles de Hô Chí Minh Ville, Vietnam de Marie Gibert-Flutre. 


Marie Gibert-Flutre s’inscrit dans un projet très concret et parfaitement illustré de la description d’une métropole asiatique en profonde mutation au cœur d’un pays pourtant encore très rural : Hô Chí Minh Ville. Avec plus de 8,5 millions d’habitants en 2011, date à laquelle l’étude a été menée, la ville connaît une croissance économique très rapide comme c’est le cas pour de nombreuses villes d’Asie du Sud-Est, du fait de la mondialisation. En s’inscrivant dès 1995 dans l’Association des Nations d’Asie du Sud et de l’Est (ASEAN) et depuis 2007 dans l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), Hô Chí Minh Ville et à plus large échelle, le Vietnam tout entier, affirme ses nouvelles ambitions d’intégration dans la mondialisation. La rénovation d’Hô Chí Minh Ville est un enjeu crucial pour mener à bien cette ambition de modernité. Marie Gibert-Flutre s’attache, grâce à de nombreux croquis, cartes, schémas mais aussi photographies à montrer un espace public particulier, la ruelle à l’interface entre privé et public, objet des attentions de rénovation urbanistique de l’État. L’importance des illustrations fournies par les cartes, et toutes les illustrations, a été un critère déterminant pour notre choix. En effet, elles permettent une meilleure compréhension des propos de M. Gibert-Flutre ainsi qu’une possibilité de contextualisation géographique au sein d’Hô Chí Minh Ville. Ce n’est pas le cas d’ouvrages comme Petit manuel pour une géographie de combat, où les croquis et les schémas sont rares alors même que l’ouvrage traite de zones géographiques variées qui auraient pu être illustrées par ces outils géographiques qui permettent de manière générale de mieux comprendre les différents enjeux potentiels.

Les habitants d’Hô Chí Minh Ville ont un rapport à l’espace public, et notamment à la ruelle, bien différent de celui des Occidentaux. Les ruelles de la ville renvoient à la « miniaturisation » et à l’« intériorité » spécifiques du tissu urbain, historiquement présentes dans de nombreuses villes d’Asie orientale. L’auteur parcourt six quartiers de ruelles péricentrales de la ville. Cette connaissance du terrain transparaît dans l’étude où le territoire est véritablement incarné et humanisé. Marie Gibert-Flutre n’hésite pas à proposer des observations très concrètes sur l’occupation des ruelles suivant l’heure de la journée. Ainsi la sociabilité de la ruelle est parfois directement liée à des fonctions économiques et commerciales. Grâce à cette étude microscopique, le lecteur comprend comment la ruelle est devenue un espace aussi important pour les Vietnamiens. Cette approche d’un véritable microcosme urbain nous a beaucoup plu, et a permis d’y porter notre choix final. En effet, contrairement au Petit manuel pour une géographie de combat ou à Frontières de Fer, qui sont des ouvrages plus généraux au vu de leur approche géographique et de leur sujet de réflexion qui se portent sur la totalité du monde (ce qui parfois nous a amené à nous y perdre), la focalisation sur un unique espace urbain permet d’en mieux comprendre les enjeux et les rouages. Lintérêt de cet ouvrage repose aussi sur sa capacité à faire le lien avec les problématiques actuelles de la mondialisation dans un mouvement du local au général. Il a paru, en effet, à certains d’entre nous que l’approche mondiale dans Petit manuel pour une géographie de combat était moins précise et trop générale, manquant peut-être parfois d’exemples et d’illustrations détaillés.


  En tant que plus petit échelon de gestion administrative d’un système institutionnel et politique centralisé, la ruelle agit comme lieu de sociabilité essentiel ce qui en fait un enjeu politique fondamental. L’exemple développé à travers l’étude de cas de Hô Chi Minh Ville est une mise en abîme de la mondialisation et de ses effets à l’échelle locale. En somme cet ouvrage nous invite à questionner ce qui fait l’espace public, en ce qu’il est un lieu de vie et d’échanges. Là où, par le prisme de la géographie locale, nous ne verrions qu’une ruelle, un espace que l’on ne représente pas sur une carte, cet ouvrage nous pousse à le penser autrement, et ce dans son rapport aux politiques de la ville mais aussi aux logiques mondiales.

C’est également le fait que cette approche micro-géographique soit réalisée dans un territoire extérieur à la France, mais également à l’Europe, qui a constitué un des principaux points positifs lors de notre lecture. En effet, si Politiques du Flamant Rose propose lui aussi une approche spatiale à l’échelle régionale, celle de la Camargue, analysée par Raphaël Mathevet et Arnaud Béchet, la proximité de ce territoire par rapport à notre situation, en France métropolitaine, et pour certains qu’il soit un espace déjà connu, nous a moins plu. Grâce à l’ouvrage de Marie Gilbert-Flutre, nous avons véritablement eu l’occasion de découvrir un nouveau monde, une nouvelle organisation urbaine et une redéfinition de notions, celle de l’espace public notamment, et c’est ce que nous avons apprécié. 


De plus, l’État vietnamien pour moderniser le pays tente de rénover ces petits espaces, les ruelles, rénovations qui dans certains quartiers pauvres sont nécessaires du fait des conditions sanitaires précaires et difficiles des habitants (égouts à ciel ouvert). L’accroissement de la population a entraîné un étalement urbain incontrôlé par l’État, préoccupé par les tensions politiques. Aujourd’hui pour s’affirmer sur la scène internationale comme un État moderne, le gouvernement vietnamien mise sur le foncier et essaye d’imposer une législation pour l’urbanisme d’ Hô Chí Minh. Les habitants de la ruelle n’acceptent pas la reprise en main par le pouvoir politique d’un espace symbolique, hiérarchisé et organisé. Pourtant certaines ruelles sont le cadre chaque année d’accidents dramatiques. La forte proximité entraîne outre les questions sanitaires, des incendies (mal maîtrisés par les pompiers qui ont du mal à intervenir) et des inondations (car la construction s’effectue parfois sur des zones inondables). Ce qui a aussi été apprécié dans l’ouvrage de Marie Gilbert-Flutre est sa neutralité politique. Contrairement au Petit manuel pour une géographie de combat ou encore Voyage au pays des Ouïghours qui ont tous deux un engagement assumé, ce qui a pu plaire à certains mais aussi déplaire à d’autres. 


Aujourd’hui, la mise en place d’un plan d’urbanisme pour la ville d’Hô Chí Minh traduit le contexte de développement du pays tout entier. Cet exemple microscopique révèle donc par une macroscopie poussée les problématiques d’un territoire bien plus vaste : continuer à s’inscrire dans la mondialisation en affirmant sa modernité (par la construction de nouveaux espaces commerciaux dans la ville), tout en assumant un statut « de ville du Sud », dont voudrait se séparer H Chí Minh. Ce plan d’urbanisme et son application permettent également de souligner le caractère actuel du sujet. 


Le principal enjeu d’Hô Chí Minh est, en tenant compte de son passé marqué par l’autoritarisme étatique et la persistance du Parti unique, dont l’urbanisme conserve le témoignage, de construire un futur plus moderne afin de s’imposer, non plus seulement comme « usine du monde » mais comme un État fort à la culture influente (doù l’importance d’une architecture cohérente). 


            Si notre préférence s’est portée après de nombreux débats – sur Les envers de la métropolisation, les ruelles de Hô Chi Minh Ville, Vietnam nous tenions à souligner l’intérêt que nous avons pris à la lecture de l’ensemble des ouvrages. Tous ont contribué à enrichir nos connaissances et à interroger notre rapport à la géographie. Le critère qui a déterminé notre choix final entre les ouvrages, en particulier entre Hô Chi Minh Ville et Voyage au pays des Ouïghours, est le critère géographique : celui de Marie Gilbert Flutre en ce qu’il relève dune thèse et d’une démarche inductive, descriptive et problématisée dHô Chi Minh Ville, nous parait davantage correspondre à un travail de géographe qu’un récit de voyage, relevant davantage du domaine sociologique que géographique. Par ailleurs ce sont probablement les échanges et les débats que chacun des ouvrages a permis que nous nous devons de mettre en avant ; nous tenons pour cette raison à remercier chacun des auteurs de nous avoir permis de repenser l’idée de la géographie que nous pouvions avoir en début dannée et de nous avoir montré que cette discipline peut avoir de multiples facettes. 




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